Après avoir roulé dans les terres espagnoles, nous avions hâte d’atteindre la côte pour changer de décor et troquer le vert des champs contre l’immensité du bleu de la mer. Réaliser que nous y arriverions à la seule force de nos mollets nous semblait encore irréel! En regardant la carte pour savoir à quel niveau nous allions pouvoir tremper nos orteils dans l’eau, nous avions décidé de viser Tarragona, qui était la plus grande ville des environs et la capitale de la Costa Dorada. Quel joli nom, la “côte dorée”, pour évoquer les reflets irisés des plages de cette bande de côte au sud-ouest de Barcelone!
Nous avons tout simplement été charmés par cette petite ville baignée de soleil qui respire la douceur de vivre et n’arrêtions pas d’en parler autour de nous à qui nous demandait des nouvelles. Tout comme nous, peu de personnes semblaient en avoir entendu parler, ce qui expliquait notre impression de déambuler dans une petite Barcelone secrète. Avec une Rambla similaire et surplombant la mer Méditerranée, Tarragone affichait un fort caractère romain et de nombreux vestiges antiques, notamment un impressionnant amphithéâtre faisant face à la mer, et autant de monuments qui lui ont valu d’être inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco.
Nous y sommes arrivés par une succession de petits villages aux ruelles étroites, dans un dégradé de tons allant du jaune au rose, et étions heureux de retrouver notre chambre d’hôtel réservée pour l’occasion. Deux nuits dans un vrai lit, le luxe! Qui dit hôtel dit aussi gros pit stop et nous n’avions pas de temps à perdre! Premier arrêt, l’atelier de vélos, parce que Björn et Sirius avaient eux aussi le droit de se ressourcer. Ils nous l’ont gentiment fait comprendre les jours précédents, à coup de cliquetis de pédalier. Après le refus du premier shop apparemment trop débordé pour les prendre sous son aile, Mariné Bicicletes étaient heureux de leur faire un service express bien mérité après ces derniers 1’500 km. Changement de freins, nettoyage des pédaliers, graissage et vérifications multiples. Ils ont passé la nuit dans le shop et se sont fait plein de copains, fiers de se raconter leurs aventures respectives à travers monts et vallées et de vanter les mérites de leurs cavaliers!
Deuxième stop, la lessive! Traversée du parc du coin pour atteindre la première laverie publique avec tout le contenu de nos sacoches habits sous le bras et beaucoup de poussière. Nous résistions à l’envie de nous mettre en maillot de bain pour pouvoir même laver les habits que nous portions, mais bon, un tel accoutrement en pleine ville aurait été curieux même par ces chaleurs espagnoles! Pendant que je m’occupais de nos habits, Pierrick lui s’était attelé au lavage… de nos sacoches elles-mêmes! J’ai bien ri en retournant dans cette chambre retournée sens dessus-dessous. Sacoches suspendues au dessus de la baignoire en marbre et tout leur contenu étalé ci et là dans la pièce, entre les jolis sachets de lavande mis à disposition par l’hôtel. On dirait qu’on n’est pas très chargé mais ce n’est qu’une fois que tout est sorti que nous nous rendons vraiment compte de la quantité d’affaires que nous transportons!
Après avoir coché plusieurs choses dans notre to-do list, nous avions estimé avoir gagné le droit à notre pause tant attendue de… tapas! Et à 17h, ce ne sont pas les petits bistrots à tapas qui manquent: une cohue incroyable avait pris place dans les rues, on aurait dit que toute la ville s’était donné le mot pour un afterwork collectif. Ça parlait fort et rigolait encore plus fort, y viiiiva Españaaaa! Nous nous sommes commandés quelques tapas, ne sachant pas trop ce que ça donnerait niveau quantité et avions à manger pour 4. Note importante: ne pas compter sur l’air des serveurs et serveuses pour jauger de la quantité, rien ne semble excessif pour les espagnols en terme de “bebidas y comidas”. Balade dans la ville qui s’était parée de son habit nocturne et un sommeil comme on n’en avait pas eu depuis bien longtemps…
Le lendemain, à défaut de notre dépense habituelle sur le vélo, nous avions chaussé nos runnings et c’était parti pour une visite en accéléré de la ville … au pas de course! Belles ruelles pavées éclaboussées d’ocre, un bord de mer qui n’était pas sans nous rappeler la jolie corniche de Beirut, des palmiers ci et là, de longues plages de sable doré, des yachts aux tailles inconcevables. En bref, c’était comme évoluer dans un paysage de carte postale, le son de la Méditerranée et les odeurs de paëlla en prime. Nous avions failli manquer le “Balcon de la Méditerranée” qui offre une vue plongeante sur les contrebas. Ce balcon serait connu pour porter chance et les passants ne manquent pas de “toucher du bois” en promenant leurs mains sur sa rampe si singulière.
Nos coups de coeur du moment: La Sangria qui passe magnifiquement bien après une longue journée au soleil ; on ne se souvenait pas qu’elle pouvait être aussi bonne et aussi rafraichissante surtout sur la Plaça de la Font. La pétillante Vichy Catalan (con hielo y Lemon por favor – avec glaçons et citron svp, même s’il semblerait que l’eau gazeuse soit indissociable de ces deux acolytes en Espagne). Et, pour avoir testé presque tous les glaciers la ville, les helados artesanales de Bico de Xeado, fabriquées avec le lait de leur ferme. A tomber!
Le lendemain, après le bon petit-déjeuner continental de l’hôtel (ça aussi ça nous avait manqué) et le passage par la case nettoyage au jet de Björn et Sirius pour peaufiner leur toilette, nous assemblons notre Tetris de sacoches et sommes heureux de retrouver le rythme après 2 journées de pause. Nous roulons sur la côte cette fois-ci, dans une toute autre ambiance que jusqu’à présent. Des chapelets de palmiers s’égrenaient tout au long de la route dans les villages de Salou et de Cambrils, sur une interminable promenade côtière qui nous donnait l’incroyable impression de rouler à South Beach, Miami! Les alpes nous semblaient alors tellement loin et le changement de décor était saisissant. Sous la touffeur du mois d’octobre espagnol qui s’apparente plus à celle d’un mois d’août en Suisse, nous rêvions d’une baignade fraîche. Nous devrons attendre d’être une soixantaine de kms plus bas que Tarragone pour pouvoir enfin goûter à notre premier bain de mer, dans le village d’Ametlla del Mar (amande de mer) où nous dormirons presque à la belle étoile.
La balade dans la réserve naturelle du Delta de l’Ebre conclut joliment notre passage dans la Costa Dorada. Les rizières s’étendent à perte de vue dans cette zone protégée qui accueille toutes sortes d’oiseaux et d’organismes aquatiques. Entre authentiques villages de pêcheurs, faune variée et flore très aquatique, c’était beau d’évoluer dans cette petite bulle de nature à l’état pur et d’être émerveillé par des milliers de flamands roses! Au bout de la lagune, l’étendue infinie de sable détonne avec nos Bombtracks bien chargés et nous inspire une chouette séance photo.
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